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Questions sur la confiance : Hervé SérieyxVice-Président du Groupe Canadien CFC, Vice-Président de la Fédération Française des Groupements d'Employeur, Membre de Section au Conseil Economique et Social.

Hervé Sérieyx, multicartes, a été chef d’entreprises, professeur d’université, haut fonctionnaire et il est aussi écrivain. A son actif quelque vingt-six ouvrages sur le management, l’entreprise et la confiance. Conférencier, il développe l’idée de la confiance nécessaire au sein des entreprises, car elle est, selon lui, au cœur de tout développement.
"La confiance : un outil de développement


Trust Management Institute : Hervé Sérieyx, diriez-vous que vos compétences ont prévalu dans votre carrière, ou bien est-elle le fruit de  la confiance que certains décideurs plaçaient en vous ?


Hervé Sérieyx : Je n’ai jamais eu de plan de carrière. Mais si je cherchais, a posteriori, un tronc commun à mes activités professionnelles, ce serait le fait de ma passion pour l’efficacité des organisations via les personnes qui s’y trouvent. Je ne crois pas du tout en l’organisation mécanicienne, je crois davantage en l’organisation vivante de femmes et d’hommes qui ensemble essaient de faire quelque chose.

TMI : La confiance au cœur des choses. Comment la voyez-vous et comment la définissez-vous ? 

H.S. : Il faut bien déceler dans la confiance, deux éléments constitutifs dont chacun est nécessaire et non suffisant. Il y a ce qu’on appelle la confiance rationnelle ou la confiance mesurée qu’on pourrait schématiser ainsi : « Ce type a un curriculum vitae, il a une expérience et une bonne renommée et donc je me dis qu’il est fiable ». Mais cela ne suffit pas. Il y a un deuxième aspect qui est la confiance affective. On dirait par exemple : « Je m’entendrais bien avec celui-là, je sens que nous avons des atomes crochus. » Nous sortons donc du rationnel pour aller dans le domaine affectif. L’un est techniquement bon, mais nous ne nous entendrons pas. Donc je me retiens. La confiance n’est pas aveugle et pour qu’elle soit réelle il faut qu’il y ait les deux aspects : le rationnel et l’affectif. Et, cette confiance-là se construit. Elle se définit par la relation à l’autre. C’est comme en amour où, à un moment, on trouve de la sympathie dans l’autre qui n’est pas réductible à l’analyse.

TMI : La confiance pour une bonne marche de l’entreprise est nécessaire. Faut-il y privilégier la confiance rationnelle, ou l’affective ? Y-a-t-il dans ce cas une hiérarchisation ?

«  La confiance est comme le changement, elle ne se décrète pas. Elle se construit. »
H.S. : Avec mon ami Jean-Luc Fallou, c’est ce que nous avons essayé d’aborder dans notre ouvrage « La confiance en pratique ». Il a pris les aspects techniques de la confiance et moi qui suis un romantique je me suis intéressé à la partie affective. J’y ai répertorié dix clefs pouvant conduire des individus d’une même équipe à partager un objectif commun : le cap, la cohérence, la coopération, la compétence, la communication, la créativité, la convivialité, le contrat social, le changement et le courage. La confiance est un pari qui se retrouve dans la somme de tous ces thèmes.

TMI : La crise dans le monde est un thème à la mode. Tout le monde veut en sortir. Dans cette crise, quelle est la part de la confiance ?

H.S. : « La confiance mode d’emploi, crise ou crise de confiance », est un livre que j’ai co-écrit avec Jean-Luc Fallou. Nous y montrons que la crise de confiance est cœur de tout. Prenons l’exemple de la France où nous sommes plutôt en présence d’une crise de défiance et qui remonte à bien loin. Deux économistes bien connus, Alain Minc et Jean-Paul Fitoussi ont récemment dit quelque chose de très intéressant : « Aujourd’hui l’équation traditionnelle : performance = capital x travail est devenue performance = capital x travail x confiance ». Et si en France on se porte si mal, c’est bien parce qu’il n’y a pas la part confiance dans cette équation. Elle est comme le changement, elle ne se décrète pas. Elle se construit. En me rapportant à l’actualité, je dirais que le fameux « Pacte de responsabilité » qui devrait créer cette confiance serait insuffisant pour le faire, pour la simple raison que les partenaires en lice ne sont pas totalement représentatifs des corporations qu’ils prétendent représenter. Toutefois, l’effet d’annonce ne sera pas négatif mais il sera insuffisant pour recréer la confiance.

TMI : Aux gouvernants que conseilleriez-vous donc pour récréer la confiance ? 

« Les pouvoirs passent, 
les gouvernements changent
et l’armée reste. »
H.S. : Je ne donnerai pas de conseils. Je pense que les choses ne changeront pas dans ce pays par sa tête mais plutôt par ses acteurs. C’est un tas de petites actions de terrain qui, peu à peu, vont transformer de l’intérieur le pays. La France n’est ni de droite ni de gauche, elle est d’Etat. La meilleure preuve est que la Gauche comme la Droite au pouvoir, à peu de choses près, conduisent  les mêmes politiques. Des petits changements marginaux ne font pas bouger les lignes. Il appartient aux citoyens que nous sommes, là où on est, dans nos mondes, ici c’est TMI, d’agir. Ailleurs c’est France Bénévolat, dont je suis vice-président national, où par exemple on développe l’idée que le bénévolat soit autre chose que le « bon petit cœur ». Nous y essayons d’aborder des problèmes sociétaux mal traités ailleurs. A titre d’exemple, il s’est agi à un moment de « lire et faire lire » pour aider des élèves en difficultés à avoir le goût de lecture. Il faut savoir qu’un nombre croissant de Français ne lisent plus ou pas du tout. Or, c’est en lisant qu’on apprend des mots, et c’est avec des mots qu’on pense, donc moins on lit, moins on a de mots et moins on pense. Nous sommes dans une situation gravissime bien observée par mes amis Québécois qui disent qu’en France « on est dans un système éducatif  qui  se résume en l’organisation d’un naufrage pour repérer ceux qui savent nager. » C’est dramatique ! Ce sont des contingences qui ne peuvent être transformées d’en haut. Il appartient donc à chacun, où il est, de prendre en charge un tout petit bout d’un problème sociétal pour essayer de le transformer ou tout au moins de l’améliorer à son niveau. 

TMI : Avez-vous, dans votre parcours professionnel, observé un exemple qui montre que la  confiance ou le manque de confiance a eu un réel impact sur le devenir d’une entreprise ?

« La confiance est outil de développement. »
H.S. : Lorsque j’étais un des dirigeant du groupe Lesieur, nous avions initié « Les cercles de qualité ». Nous avons pu voir un dynamisme de nos ouvriers et employés pour apporter des innovations qui ont permis à notre entreprise de passer de caps difficiles. Leur implication pour contrer par exemple la flambée des prix des matières premières, a permis à l’entreprise de maintenir un bon niveau de production sans perdre en service sur le marché, et cela grâce à la confiance que les dirigeants ont placé dans la capacité des employés d’apporter des idées nouvelles et surtout de développement.  La confiance est outil de développement.

TMI : Que pensez-vous apporter à cette structure TMI ?

H.S. : Je suis un des contributeurs, d’abord avec le groupe Raphaël, puis ici aujourd’hui sur la réflexion de la confiance dans l’entreprise. Autant que d’autres je crois dans ce qui est fait à TMI. L’économiste, Yann Algan disait  qu’il était « pessimiste d’humeur et optimiste de volonté ». Cela me convient. Je crois dans mon pays, je crois dans l’Europe. On doit croire en la possibilité de l’humanité à se développer et la France au cœur de cela, sans prétention universelle, doit en permanence le rappeler. TMI joue un rôle dans cet esprit et je suis ravi de m’y trouver. Je  souhaite que cet institut connaisse un développement et se retrouve à une taille européenne. Restons modestes, on est à notre place, mais ayons de l’ambition avec la perspective d’un développement à l’image d’une graine qui peut pousser dans toutes les sociétés européennes.


Propos recueillis par Didier Samson

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